Pierre Soulages est né en 1919 à Rodez, dans l’Aveyron. Son père, un carrossier qui fabrique des charrettes, meurt alors qu’il n’a que sept ans. Il est élevé par sa mère et sa sœur plus âgée que lui. Enfant, il s’évade en fréquentant les artisans de son quartier. Il en gardera un goût pour les outils, utilisant des pinceaux de peintre en bâtiment ou fabriquant lui-même ses instruments.
Lors d’un voyage de classe, il visite l’abbatiale romane de Conques dont il créera les vitraux, des années plus tard, un choc esthétique qui décidera de sa carrière : “C’est là, je peux le dire, que tout jeune j’ai décidé que l’art serait la chose la plus importante de ma vie”.
Il peint régulièrement à partir de 1934 et monte à 18 ans à Paris pour préparer le concours de l’école des Beaux-Arts. Il est admis mais il trouve l’enseignement médiocre et décide d’en partir.
La période de la guerre est mouvementée : il est mobilisé en juin 1940, démobilisé début 1941, il étudie à l’Ecole des Beaux-Arts de Montpellier, puis travaille dans un vignoble sous une fausse identité pour échapper au travail obligatoire en Allemagne.
La carrière de peintre de Pierre Soulages commence réellement quand il s’installe en banlieue parisienne en 1946. D’emblée, ses œuvres sont abstraites. Il combine d’épaisses lignes verticales, horizontales, obliques, comme des idéogrammes.
Pierre Soulages peint sur papier avec du brou de noix, sur des verres cassés avec du goudron, il utilise des couleurs sourdes, de l’ocre au noir en passant par le rouge ou des bruns plus ou moins intenses.
A partir de 1951, Soulages pratique aussi la gravure, sur plaques de cuivres. Ses estampes de petite taille utilisent toutes ces couleurs, en contraste avec le noir. Il réalise plus tard des lithographies où il utilise des couleurs plus vives, rouge vermillon, jaune vif, bleu. Puis des sérigraphies, sur papier, il peint des gouaches où il introduit des bleus intenses et lumineux.
Dans ses peintures des années 1950-1970, il fait contraster des formes noires avec des fonds colorés, puis il fait apparaître les couleurs du fond en raclant le noir. Ou bien il fait contraster le noir avec le blanc.
C’est en 1979 que Pierre Soulages invente l'”outrenoir” , pour lequel il est le plus connu, où il n’utilise que le noir. En 2009, lors de la rétrospective du Centre Pompidou, il expliquait que l'”outrenoir” est né alors qu’il était en train de “rater une toile. Un grand barbouillis noir”. Malheureux, il est allé dormir. “Au réveil je suis allé voir la toile”, racontait-il. “J’ai vu que ce n’était plus le noir qui faisait vivre la toile mais le reflet de la lumière sur les surfaces noires. Sur les zones striées, la lumière vibrait, et sur les zones plates tout était calme.” Un nouvel espace s’ouvre, pour lui, devant la toile : “La lumière vient du tableau vers moi, je suis dans le tableau.” Il se met alors à jouer avec la matière de la peinture noire qu’il travaille avec des outils, créant du relief, la rendant luisante ou mate. Dessus, la lumière produit des changements de couleur. D’une toile en trois panneaux, qu’il avait observée chez lui à Sète, près de la Méditerranée, et qu’il présentait au Centre Pompidou en 2009, Pierre Soulages a dit : “Certains matins, elle est gris argent. A d’autres moments, captant les reflets de la mer, elle est bleue. A d’autres heures, elle prend des tons de brun cuivré (…). Un jour, je l’ai même vue verte : il y avait eu un orage et un coup de soleil sur les arbres qui ne sont pas loin de là.”
Pierre Soulages continue la peinture alors âgé maintenant de 100 ans.
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