Après la chasse, un jeune homme prénommé Narcisse se désaltère à une source d’eau pure et s’éprend de son reflet. Éperdument amoureux, il tente de saisir sa propre image, incapable de s’arracher à sa contemplation. C’est ainsi qu’Ovide nous raconte le mythe de Narcisse dans ses métamorphoses.
Le sujet fascine les artistes, Caravage, lui donne toute sa puissance. Car contrairement à beaucoup d’autres il n’inscrit son Narcisse dans aucune narration. Plus fort encore, il l’habille de vêtements contemporains l’éloignant ainsi du récit mythologique.
Caravage raconte l’instant où le jeune homme se découvre agenouillé au bord de l’eau, dans une obscurité enveloppante. La composition du peintre distingue un double portrait. Celui d’un jeune homme lumineux, sentimental et celui d’une ombre plus imprécise. Même si Narcisse n’est qu’un, ce sont deux personnages que nous observons. Deux opposés qui s’attirent ou alors nos contradictions intimes qui se complètent, le tangible et l’invisible. Le jeune homme ne sait pas que celui qui l’admire n’est autre que lui même. Caravage érotise la posture de Narcisse au cou sensuel, mais surtout, il ferme les yeux et tend la bouche, prêt à déposer un baiser sur les lèvres de l’être aimé. Mais la figure fantomatique échappe à ses caresses. La scène plongée dans l’obscurité propre au Caravage, n’annonce pas seulement le destin funeste du personnage qui mourra de désespoir, mais elle décrit aussi le drame intime du désir insatisfait, celui d’un amour non réciproque.
Leave a reply